Raymond Roger, actuel propriétaire de Terride, passionné d'architecture militaire, travaille depuis des années au dégagement des anciennes fortifications du château. L'an dernier, il a mis au jour les restes des tours qui couronnaient le système des remparts. Il a dû pour cela faire venir des engins spécialisés, et, compte tenu de la forte déclivité du terrain, l'accès de ces engins au pied des zones concernées n' a pas été une mince affaire.
Ci-dessus, on voit l'une des tours dont les restes ont été dégagés, la seule qui ait conservé une part de sa superbe ancienne.
L'enceinte du château était ainsi flanquée de trois tours d'angle, en sus de la tour axiale, hélas détruite au XIXe siècle, édifiée au-dessus de l'unique porte d'entrée du site.
Totalement ruinées, les autres tours d'angle ont disparu. Il reste seulement un tumulus et quelques pierres.
Les pierres disparues ont probablement été réutilisées ailleurs sur le site.
On sait que la demeure au fronton triangulaire, située entre le donjon et la chapelle, a été aménagée au XVIIe siècle, tout comme le pont de pierre à trois arches qui franchit le fossé à l'aplomb de la porte du château. Apposée sur l'une des arches du pont, une date indique que celui-ci date sans doute du temps de Jean de Lévis Lomagne, dernier membre de la famille de Lévis qui ait occupé le château.
Les restes des courtines qui s'élevaient jadis entre les tours d'angle ont également été dégagés l'an dernier.
Les murs de l'enceinte épousent la pente du terrain.
Appareillés d'abord de pierres sèches, les murs d'enceinte étaient ensuite revêtus d'un parement de pierres taillées, savamment agencées dans les redents.
La hauteur de ces murs couronnés de tours composait jadis au château un visage formidable, fait pour signifier au regard de la plaine la puissance du seigneur et le caractère panoptique du contrôle exercé sur la communauté toute entière. Mais pareil retranchement derrière d'énormes fortifications témoigne aussi de la défiance nourrie par les premiers seigneurs de Lévis à l'encontre de la dite communauté qui les a toujours tenus pour des Mounfort, i. e. pour des créatures de Simon de Monfort, desFrancimans, acteurs de la croisade contre les Albigeois, à ce titre responsables de la ruine de la civilisation occitane.
Il faut se représenter le château de Terride, première demeure des seigneurs de Lévis en pays de Mirepoix, comme une forteresse, ceinte comme dit Virgile d'un "trois fois triple tour", plus exactement d'un premier mur courant à flanc de rocher à mi-hauteur de la colline ; puis, séparé de ce premier mur par une zone de taillis escarpée, chaotique, le rempart décrit plus haut, avec ses quatre tours et son chemin de ronde ; puis séparé encore du rempart par un fossé profond ou des glacis, le donjon, lui-même assis sur une base cyclopéenne, prolongée derechef jusqu'à la porte du domaine par de hautes courtines percées d'archères et surmontées d'une échauguette, chargée de surveiller la dite porte.
J'ai fait en compagnie de Raymond Roger le tour du chemin de ronde.
On marche sur ce qui fut jadis un lit de briques recouvertes de pierres. Outre le lit de briques, ménagés entre les pierres, des espaces en forme de goulotte facilitent l'écoulement des eaux.
Les restes de briques sont de fabrication médiévale. Ce chemin de ronde daterait, me dit Raymond Roger, du premier Moyen Age, i. e. du temps des Bellisen, feudataires du comte de Toulouse, premiers maîtres du château, avant l'ère des seigneurs de Lévis.
Raymond Roger a prévu de poursuivre cette année sa campagne de fouilles. Le spectacle des anciennes fortifications qui ressurgissent de la terre et du hallier lui inspirent une satisfaction qui nourrit sa passion de l'histoire. Il sait faire partager cette passion à ses hôtes. Grâce à lui, qui a joué pour moi les cicerones, j'ai mieux compris le statut, aujourd'hui oublié, qui a été jadis celui du château de Terride. La ruine de ces fortes murailles m'a rappelée au souvenir de la grandeur et de la décadence des empires…
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